BLUE VALENTINE

LE REALISME ET L’IMPROVISATION AU CŒUR DU FILM

Derek Cianfrance a mis son expérience documentaire à profit pour son deuxième long métrage de fiction, BLUE VALENTINE. Tenant à filmer les scènes dans des établissements réels et le véritable personnel de ces lieux plutôt que des acteurs, il affirme ce parti pris stylistique et sa volonté de rendre son film le plus honnête possible.  C’est dans cette même démarche de réalisme que les acteurs principaux, Michelle Williams et Ryan Gosling, ont été invités à vivre ensemble avant le tournage et à réaliser leurs propres films de famille nourrissant ainsi l’intimité entre les personnages pendant le tournage.

L’improvisation est un point essentiel du travail de Derek Cianfrance qui oblige les acteurs à se donner corps et âme. Lors de cette grande scène improvisée de BLUE VALENTINE, Dean, joué par Ryan Gosling, marche sur le pont de Brooklyn et essaie d’arracher un secret à sa petite amie Cindy, interprétée par Michelle Williams. Le réalisateur avait initialement écrit la scène. Mais, au moment du tournage, il demanda aux acteurs d’improviser : Michelle Williams ne devait pas révéler son secret afin que Ryan Gosling se surpasse. Elle céda enfin quand l’acteur eut la bonne idée de faire croire qu’il allait se jeter du pont au moment du coucher du soleil.

Sur le tournage, Ryan Gosling a également pris l’initiative de demander au réalisateur de les suivre toute une nuit avec la caméra et de les filmer en totale liberté. Lors d’une scène, Ryan avait ce ukulele (une référence à Al Pacino dans L’EPOUVANTAIL) dont il ne pensait pas se servir. Mais voulant surprendre Michelle Williams, il a  interprété une vieille chanson (« You always hurt the one you love ») accompagné de son instrument. L’actrice s’est alors mise à improviser une petite danse.

LA LONGUE GESTATION D’UNE ŒUVRE PERSONNELLE

Pour des raisons logistiques et budgétaires, 12 années ont été nécessaires pour concrétiser ce projet de film. Cette lente maturation, alliée à sa propre expérience conjugale et 57 versions du scénario, ont finalement permis à Derek Cianfrance d’arriver au résultat escompté : « un film adulte, vivant, vibrant. Nous avons fait le film que nous voulions faire. »

L’idée de cette œuvre lui est venu de ses angoisses d’enfant de voir un jour ses parents se séparer, des craintes qui sont un jour devenues réalité et ont nourris son écriture : « Et, à l'âge de 20 ans, ils ont effectivement divorcé. C'est horrible d'avoir à vivre quelque chose que je redoutais depuis tant d'années. Je me suis donc mis à écrire pour coucher sur le papier ce que je ressentais. Mes sentiments étaient alors totalement contradictoires. J'en voulais d'abord à ma mère parce que c'est elle qui était partie.

Mais, peu après, j'ai compris que c'est le comportement de mon père qui l'avait sans doute poussée à faire ce choix. J'ai donc voulu écrire un scénario en parlant de tous ces sentiments qui fluctuent en un minimum de temps. Ensuite, le fait de devoir attendre pour le tourner pour cause de financement n'a fait qu'améliorer le travail, en tout cas le nourrir de ma propre évolution. Puisque si j'étais célibataire au moment où j'en ai écrit la première ligne, je suis aujourd'hui marié avec deux enfants. J'ai donc pu expérimenter par moi-même la vie à deux, ses moments de bonheur et de crise, que j'allais avoir à montrer. »