NOUS (MENK) 1969
Réalisation : Artavazd Pelechian
Image : Laert Porossian, Elisbar Karavaev, Karen Messian Son : F. Amirkhanian
Musique : F. Amirkhanian, Bellini (La Norma) Montage : L. Volkova
Production : Studio Erevan
N/B - Durée : 25 min
GRAND PRIX AU FESTIVAL D’OBERHAUSEN, 1970

Un montage alternant images préexistantes et fabriquées, qui composent une lyrique inquiète, d’un humanisme vibrant, où les regards succèdent aux visages, où le peuple arménien semble résister à toutes les blessures, à toutes les épreuves dont le quotidien rappelle symboliquement la teneur : dramatique avec un enterrement, comique et tragique à la fois, lorsque le conducteur d’un triporteur disparaît dans les gaz d’échappement du véhicule qui le précède, bouleversante lors de la séquence des retrouvailles, où hommes et femmes s’embrassent, s’enlacent, jusqu’au vertige. Sous le regard d’un visage d’enfant, visage primitif, visage douloureux dont la répétition souligne une volonté farouche de partage, de reconnaissance, et de paix universelle.
« Comment oublier ce peuple arménien en larmes dans les images d’archives des rapatriements successifs (de 1946 à 1950) : retour au pays, étreintes, retrouvailles, corps déportés par l’émotion et le montage qui, au sein de ces images, vrille comme un tourbillon, un vertige, une défaillance ? »
Serge Daney, Libération, 11 août 1983

« C’est lors de mon travail sur le fi lm NOUS que j’ai acquis la certitude que mon intérêt était attiré ailleurs, que l’essence même et l’accent principal du montage résidait pour moi moins dans l’assemblage des scènes que dans la possibilité de les disjoindre, non dans leur juxtaposition mais dans leur séparation. Il m’apparut clairement que ce qui m’intéressait avant tout ce n’était pas de réunir deux éléments de montage, mais bien plutôt de les séparer en insérant entre eux un troisième, cinquième, voire dixième élément. En présence de deux plans importants, porteurs de sens, je m’efforce non pas de les rapprocher, ni de les confronter, mais plutôt de créer une distance entre eux. Ce n’est pas par la juxtaposition de deux plans mais bien par leur interaction par l’intermédiaire de nombreux maillons que je parviens à exprimer l’idée de façon optimale. L’expression du sens acquiert alors une portée bien plus forte et plus profonde que par collage direct. L’expressivité devient alors plus intense et la capacité informative du fi lm prend des proportions colossales. C’est ce type de montage que je nomme montage à contrepoint. »
Artavazd Pelechian

LES SAISONS (TARVA YEGHANAKNERE), 1972
Réalisation : Artavazd Pelechian
Image : M. Vartanov,ww B. Hovsepian, G. Tchavouchian Montage : Aida Galstian Musique : Vivaldi, V. Kharlamenko Production : Studio Erevan
N/B - Durée : 29 min

Glissades à fl anc de montagne sur des traîneaux de paille, brebis égarées dans un torrent bouillonnant, Pelechian et sa caméra se laissent emporter par une ronde de la vie menée par les bergers arméniens. Moissons, transhumances, les saisons se suivent, prolongeant les rites de ces éleveurs dans un éternel recommencement.

« Peut-être l’un des plus beaux fi lms du cinéaste, c’est en tout cas celui qui lui assure aujourd’hui une reconnaissance internationale. LES SAISONS est un très beau poème où sont évoqués, en une vaste parabole, les moments déterminants de l’histoire arménienne, depuis les origines volcaniques, jusqu’à la période industrielle. Mais au-delà de cette symbolique où l’on peut lire aussi l’histoire des migrations du peuple arménien, demeurent des séquences étonnantes et inoubliables : l’inertie lente et aventureuse d’une transhumance, des corps en apesanteur, comme passant, infi niment, par-dessus les terres, ou par-
dessus les fl ots, méprisant tous les ancrages, une vision ludique, apaisée, de la moisson et de la fenaison, et ce rythme, surtout, ce rythme qui nourrit l’émotion, sans discours et sans commentaire, et qui fait de toute épreuve le témoignage d’un humanisme salutaire et sublime. »
Pierre Arbus

NOTRE SIÈCLE (NACH VEK), 1982
Réalisation : Artavazd Pelechian
Image : O. Savin, L. Porossian, R. Voronov, A. Choumilov Son : O. Polissonov
Montage : Aida Galstian Production : Studio Erevan
Monochrome - Durée : 50 mn

Une méditation sur la conquête de l’espace, les mises à feu qui ne vont nulle part, le rêve d’Icare encapsulé par les Russes et les Américains, le visage des cosmonautes déformés par l’accélération, la catastrophe imminente... Pelechian procède à la mise en orbite d’un corps désorienté, pris dans la turbulence de la matière. Là, il n’y a plus rien d’humain, ce n’est plus l’homme dans le cosmos, mais le cosmos dans l’homme.

« Toujours des processions, à la gloire de NOTRE SIÈCLE, toujours cette impression d’une menace qui ne se dit pas, d’une rumeur qui se manifeste, mais ne s’incarne pas ; notre siècle, on ne l’oubliera pas, c’est le siècle des conquêtes et des génocides, le siècle de toutes les vanités aussi : les hommes vont y faire l’épreuve de toutes leurs prétentions. Ils lutteront contre les déterminismes de la nature, fabriqueront leur légende à coup de travestissements, de protocoles intimidants, d’audaces et d’entêtements, pour ne laisser en guise de témoignage que quelques images qui redisent, inlassablement, l’absurdité de cette vocation instinctive et totalitaire à la colonisation et à l’occupation des mondes. »
Pierre Arbus

« Longue méditation sur la conquête de l’espace, les mises à feu qui ne vont nulle part, le rêve d’Icare encapsulé par les Russes et les Américains, le visage défait par l’apesanteur des cosmonautes accélérés, la catastrophe qui n’en fi nit pas de venir. »
Serge Daney, Libération, 11 août 1983

 

Hommage à l'oeuvre de Artavazd Pelechian - Distribué par Films sans Frontières